Répression

Quels faits parlent en faveur de la révision ?

La politique drogues de la Confédération est claire : la vente et l’usage de stupéfiants sont interdits. La répression s’attache à faire respecter cet interdit général en sanctionnant les trafiquants et les usagers.

Les objectifs directs de la répression dans le  domaine de la drogue consistent à limiter l’offre, à lutter contre le trafic illicite de stupéfiants et les transactions financières illicites qui y sont liées, et à lutter contre le crime organisé.[1]

Les mesures de répression ne visent toutefois pas que la réduction de l’offre, mais aussi celle de la demande de drogue. Actuellement encore, les personnes dénoncées pour consommation de drogues illégales sont nettement plus nombreuses que celles qui sont dénoncées pour trafic ; la plupart des dénonciations concernent la consommation de cannabis, suivie de celle d’héroïne et de cocaïne. Ces délinquants bénéficient souvent d’une suspension de peine au profit de mesures thérapeutiques. En cas de consommation simple, ils peuvent aussi bénéficier d’une exemption de peine. [2, p 66]

En 1994, lorsque le Conseil fédéral prit cause pour la réduction des risques, il renforça le pilier répression.

En 1994, le Conseil fédéral prit explicitement fait et cause pour le modèle des quatre piliers, c’est-à-dire pour une politique de la drogue reposant au même titre sur les piliers prévention, thérapie, réduction des risques et répression. Il confia en outre à une commission le soin d’élaborer des propositions pour une révision de la Loi sur les Stupéfiants. En parallèle, les moyens de répression légaux furent renforcés: le délit de «crime organisé» fut adopté dans le code pénal, les mesures de lutte contre le blanchiment d’argent furent renforcées, la collaboration internationale de la police fut élargie et l’expulsion d’immigrés illégaux fut réglementée plus sévèrement dans la Loi sur les étrangers. [3, p 56]

En Suisse, la politique drogues n’est pas laxiste. Le pilier répression constitue  à lui seul presque les 2/3 des coûts directs de l’ensemble de la politique drogues. En 2000, le coût de la répression était de 800 millions.

Les coûts directs de la drogue comprennent toutes les dépenses effectuées pour prévenir et corriger les conséquences négatives de la consommation de drogues illégales, qu'il s'agisse du traitement des atteintes à la santé, de traitements de substitution, d’aide à la survie, de frais de police ou de justice, d’incarcération ou de dommages matériels.

Au total, les coûts directs se montent à 1,4 milliard de francs par année.
Les quatre piliers de la politique de la drogue (prévention, thérapie, réduction des risques et répression) ont une épaisseur très inégale puisque la répression absorbe 2/3 des ressources. [4]

La part des dépenses de police liées à la drogue représente aujourd’hui 22,5% des dépenses totales de police, soit 521,8 millions de francs. […] [4, p 41]

Depuis 2002, le nombre annuel de dénonciations à la LStup s’est stabilisé aux environs de 50'000 dénonciations par année.

Si l’on considère le nombre total des dénonciations, on observe une progression constante du début des années 1970 au début des années 1990 : de 5’000 en 1974 à 20'000 en 1990. Ensuite, de 1990 à 1993, les dénonciations ont fait un bond à près de 38'000. Le rythme de croissance a ensuite faibli, mais la hausse s’est poursuivie. Depuis 2002, le nombre annuel des dénonciations s’est stabilisé (environ 50'000). [5]

En 2006, 86 % des dénonciations avaient pour objet la consommation

En 2006, un total de 47'001 dénonciations pour infraction à la Loi sur les Stupéfiants a été enregistré. [...] La plupart des dénonciations (86%) ont pour objet la consommation uniquement. Le trafic seul est à l’origine de 6% des dénonciations, le trafic et la consommation de 8%. [5]

La répression à l’égard des dealers s’est renforcée!

En 2007, « Les dénonciations enregistrées pour trafic de stupéfiants ont augmenté de 14,6% par rapport à l'année précédente, passant de 2’450 à 2’809. Une fois encore, la majorité des dénonciations a été enregistrée pour le trafic de cocaïne, suivi du trafic de marijuana et d'héroïne. » [6]

En comparaison internationale

La Suisse consacre une part très importante de son budget drogues à la répression.

Au niveau de la proportion du budget total de la drogue dédié à la répression, la Suisse se situe tout en haut des dépenses en comparaison européenne. Seule la Suède fait mieux que la Suisse en consacrant 77% du budget drogues à la répression : la Suisse est-elle vraiment laxiste en la matière ?

Six pays ont fourni des informations détaillées sur les dépenses liées à la lutte contre la drogue. Dans ces pays, les dépenses publiques liées à la drogue ont représenté entre 0,11 et 0,96 % de la totalité des dépenses publiques générales au cours de l’année (moyenne: 0,32 %) ou entre 0,05 et 0,46 % du produit intérieur brut (PIB) national (moyenne: 0,15 %). Les activités de «répression» ont représenté entre 24 et 77 % des dépenses totales, le reste des dépenses étant consacré aux activités de «soins de santé et de protection sociale».

Compte tenu des données fournies par ces six pays, le calcul des dépenses publiques liées à la drogue pour l’ensemble des pays européens donne un total se situant dans une fourchette de 13 à 36 milliards d’euros. Ces chiffres représentent 0,12 à 0,33 % du PIB de l’UE (vingt-cinq pays) en 2005. [7, p 24-25]

Alors qu’en Suisse le nombre d’infractions à la LStup s’est stabilisé depuis 2002, on a constaté en Europe une hausse de 47% des infractions à la législation antidrogues entre 2000 et 2005.

D’une manière générale, au niveau de l’UE, le nombre de «cas signalés» d’infraction à la législation antidrogues a augmenté en moyenne de 47 % entre 2000 et 2005. Les données traduisent un accroissement des tendances dans tous les pays déclarants, à l’exception de la Lettonie, du Portugal et de la Slovénie qui ont signalé un recul global sur cette période de cinq ans. [7, p 26]

L’équilibre entre les infractions liées à la consommation et celles qui sont liées au trafic varie, la plupart des pays européens déclarant que la majorité des infractions sont liées à la consommation ou à la possession destinée à la consommation de drogue; pour 2005, les chiffres atteignent 91 % en Espagne. Toutefois, en République tchèque, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Turquie et en Norvège, ce sont les infractions liées à la vente et au trafic qui prédominent (jusqu’à 92 % en République tchèque, de la totalité des infractions liées à la drogue déclarées en 2005). [7, p 26]

 

 

Bibliographie

[1] CSSS-CN, Rapport  de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national du 4 mai 2006 sur l'Initiative parlementaire: Révision partielle de la loi sur les stupéfiants, 2006; http://www.admin.ch/ch/f/ff/2006/8141.pdf.

[2] Ledermann S, Sager F, La politique suisse en matière de drogue
Troisième programme de mesures de la Confédération en vue de réduire les problèmes de drogue (ProMeDro III) 2006-2011
,  Berne: Office fédéral de la santé publique (OFSP), 2006.

[3] Spinatsch M, Hofer S., Une nouvelle politique en matière de dépendances pour la Suisse? Bases et prémisses pour une politique fédérale plus intégrée en matière de dépendances., 2004; http://www.bag.admin.ch/evaluation/01759/02066/02339/index.html?lang=fr&download=M3wBPgDB/8ull6Du36WenojQ1NTTjaXZ
nqWfVp7Yhmfhnapmmc7Zi6rZnqCkkIR2f3Z/bKbXrZ6lhuDZz8mMps2gpKfo.

[4] Claude Jeanrenaud , Gaëlle Widmer, et Sonia Pellegrini, Le coût social de la consommation de drogues illégales en Suisse. Rapport final ,  Neuchâtel: Institut de recherches économiques et régionales, 2005;

[5] Office fédéral de la statistique, “Dénonciations selon la LStup - Commentaire”; http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/19/03/02/key/03/05.html.

[6] fedpol, Statistique policière de la criminalité - Statistique suisse des stupéfiants 2007,  Berne: Office fédéral de la police , 2008;
http://www.fedpol.admin.ch/etc/medialib/data/kriminalitaet/statistik/kriminalitaet.Par.0010.File.tmp/ALLES_DEF_BMS_PKS_07_FR.pdf.

[7] Tim Pfeiffer-Gerschel  et coll., 2007 National Report to the EMCDDA  by the REITOX National Focal Point Germany , Deutsche Referenzstelle für die Europäische Beobachtungsstelle für Drogen und Drogensucht (DBDD), 2007; http://www.dbdd.de/Download/REITOX_D2007_E.pdf.

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